Du temps où la télévision française avait à cœur de nous cultiver plutôt que de nous « Expertiser » à la sauce FBI, régulièrement un Bernard Pivot, la mèche plus rebelle que jamais nous promettait, la mine gourmande, un invité spécial la semaine suivante. Nous savions qu’il voulait parler de son chouchou, celui qui s’est assis des dizaines de fois devant nous, casant avec bien du mal sa longue carcasse et ses jambes interminables entre 2 invités , captivés avant même qu’il ait ouvert la bouche. Captivée comme moi, que dis-je fascinée par ce beau jeune homme qui à l’instar des collections automne-hiver de haute couture sortait son livre chaque année et savait si peu en parler. Et là reside la magie du charme ou du charisme, la mise en valeur faite par Pivot était tellement efficace que Modiano avait beau bafouiller, hésiter, ne pas finir ses phrases, dire « non je crois que, mais il faudrait, oui par contre ce n’est pas » laisser de grands silences s’installer, malgré tout cela j’avais envie de me jeter sur le livre en question et je buvais ses paroles, rares. Ce long préambule pour arriver au fait que l’autre soir, chez Guillaume Durand, il y avait un ancien beau jeune homme…Modiano est toujours aussi grand mais la chevelure à la Rimbaud a fait place à une crinière blanche et des lunettes garnissent son nez, les changements s’arrêtent là, toujours la même difficulté à s’exprimer, quoique…il a terminé une ou deux phrases « accouché, par G. Durand. Le bon temps de la culture pour tous était revenu, Modiano a toujours le génie des titres et moi comme une idiote je prendrai le livre à la bibli, sachant pertinemment que dés le début je n’y comprendrai rien, que pas un mot ne m’accrochera, je le refermerai avant de l’avoir fini en regrettant amèrement d’être à ce point hermétique à ce que l’on dit excellent.